Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Journal d'un Schizophrène
21 juillet 2016

D'un état à l'autre

au_jourlejourIl y a un an, lors de ma dernière hospitalisation, mon assistante sociale a fait des démarches afin que je puisse être reconnu comme une personne handicapée. Mon dossier est en cours de traitement. C'est très long. Il faut compter six mois dès la réception du dossier à la M.D.P.H. et six mois de plus entre la visite médicale avec un psychiatre et la commission d'attribution. En tout, j'ai vu trois psychiatres et un expert psychiatrique qui m'a évalué. Il faut dire que je suis un cas assez particulier, pour ne pas dire singulier. Lors de mes crises, je suis totalement déconnecté de la réalité et lorsque je suis en rémission, je suis très lucide sur moi. C'est très étrange. J'ai l'impression d'avoir deux personnalités alors qu'en fait, je suis le même, mais je n'ai pas la même perception du monde d'un état psychotique à un état « stabilisé ». Quand je suis sous contrôle médicamenteux, le monde me paraît tellement obscur, vide de sens et d'intérêts. J'ai vraiment du mal à affronter l'extérieur et à me fondre dans la société. Cela me demande beaucoup d'efforts. Lorsque je reviens du supermarché, je suis lessivé, complètement vidé. Je range les courses rapidement et je pars m'allonger quelques minutes pour reprendre de l'énergie. Je vis chaque sortie obligatoire (boulangerie, pharmacie, supermarché, rendez-vous au pôle emploi) comme un vrai parcours du combattant. Il n'y a qu'aux rendez-vous chez ma psychiatre que je suis à-peu-près d'attaque, car elle me suit depuis plus d'un an, et elle sait comment me canaliser.

En revanche, quand je suis en pleine crise de bouffée délirante, la vie prend une saveur particulièrement agréable (au début). J'ai envie de sortir marcher au bord de la rivière et m'oxygéner. D'ailleurs, je marche énormément pendant mes crises et à n'importe quelle heure de la journée ou du soir. Je marche, je parle et j'écoute « l'autre ». Je ressens en moi des pouvoirs extrasensoriels et j'ai un immense sentiment d'être protégé par une force divine. Je suis comme enveloppé par une présence bienfaitrice qui me guide. Puis, peu de temps après cet état de grâce, je regarde les gens et je vois tout leur défaut. Ils m'apparaissent comme de vilains missionnaires du diable et là, le cauchemar commence. Une multitude de questions s'emmêlent dans mon esprit. J'ai d'horribles crises d'angoisse hallucinatoires. Je perds le sommeil, alors je marche, je marche, encore et encore, et je me parle et j'écoute « l'autre ». À ce moment-là, plus rien n'a de logique ni d'explication. Le temps n'existe plus, il est figé dans l'irréel. Mon comportement est tellement bizarre que les gens (qui me croisent) finissent par appeler les pompiers et je finis à l'hôpital (mon dernier épisode psychotique c'est conclu comme cela).

Je vis avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Je ne sais pas comment se passera la prochaine crise et ça m'angoisse. Tout est sous contrôle avec mon traitement, mais j'ai conscience que ma maladie frappe sans prévenir et à n'importe quel moment.

Publicité
Publicité
Commentaires
N
Le tissu aquatique de la vie, t'emmène là où l'horizon était un rêve autrefois. À chacun son voyage, par fleuve, rivière, torrent, rapides. D'amont en aval, d'aval en amont, l'océan est ta source...
S
Nous vivons tous avec une épée de Damoclès au dessus de notre tête certains en son conscient ... d'autre non ... je crois ... ensuite à nous de voir. <br /> <br /> <br /> <br /> C'est comme cette histoire où deux personnes se retrouvent dans un camps de prisonnier de guerre ... même traitement ... même risques ... même problème ... la guerre prend fin ... l'un passe le reste de sa vie à souffrir ... l'autre s'ayant découvert des forces nouvelles prend la vie au jour le jour et atteint un état de non souffrance ...
Journal d'un Schizophrène
Publicité
Archives
Newsletter
Publicité